Sondage: les Européens contre la légalisation du cannabis

Publié le par Arnaud Aubron

 

L’information n’est pas toute neuve mais elle est passée largement inaperçue jusqu’à ce que le bureau du Tzar antidrogues américain n’en fasse état sur son blog : seuls 26% des Européens seraient favorables à la légalisation du cannabis. Ce sont les résultats de l’Eurobaromètre de la Commission de Bruxelles, qui a interrogé 29000 citoyens de l’Union (cliquer sur la carte pour le détail par pays).

Des résultats qui font triompher les autorités à Washington: «L’idée, très souvent utilisée par les antiprohibitionnistes (américains, ndlr) selon laquelle les Européens sont plus ouverts et accepteraient la légalisation de la marijuana n’est tout simplement pas vraie.» Dans un sondage Gallup réalisé l’année dernière, 36% des Américains se déclaraient pour la légalisation.

On peut bien sûr, comme l’a immédiatement fait la blogosphère antiprohibitionniste américaine (lire sur Drug WarRant ou sur Stop the Drug War), rappeler que le thermomètre est incertain, que le résultat des sondages, surtout en ce domaine, dépend beaucoup de la question posée. Mais si l’on compare, en France, ce résultat aux précédents, les partisans de la légalisation oscillent toujours entre 20 et 30%. Ils étaient donc 28% en octobre dernier selon l’Eurobaromètre, 20% en novembre 2005 (Nouvel Obs/Sofres) 28% en août 2005 (Figaro Magazine/Sofres) et 30% en mai 2000 (Figaro Magazine/Ipsos). Un ensemble relativement cohérent, sauf à croire que certains aient pu loucher sur la copie du voisin.

Qu’en conclure alors ? Que la guerre à la drogue que livrent les Etats-Unis à leurs propres citoyens n’a rien à voir avec la prohibition à l’Européenne. Dans l’Union à vingt-cinq, seuls cinq pays (dont la France) considèrent encore la consommation de cannabis comme une infraction pénale. Pour les vingt autres, le passage d’une dépénalisation de facto à une légalisation de jure n’est certainement pas une priorité. Mais très certainement une limite à la signification de l’Eurobaromètre. Dans les autres pays européens, comme la France, peut-être faut-il y voir la faiblesse d'un mouvement antiprohibitionniste qui n'aura jamais su, ou pu, se faire prendre au sérieux et trouver des relais institutionnels suffisamment puissants pour peser sur le débat. Peut-être faut-il aussi y voir la frilosité d'une classe politique et médiatique qui n'a jamais envisagé ce qu'il pouvait y avoir à gagner à se singulariser sur un sujet peu porteur de retombées à court terme.

Quant à l’avenir ? Les jeunes Européens (15-24 ans) s'opposent à 57% à la légalisation… Peut-être, comme le concluent un peu rapidement les auteurs de l’enquête, faut-il finalement juste voir dans tout cela « une preuve supplémentaire que les Européens pensent qu'il y a trop de tolérance de nos jours. ». Au train où vont les choses, ce problème-là devrait être vite réglé.

Publié dans drogues

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
D
Ils ne savent pas; ils ne comprennent pas, donc ils font n\\\'importe quoi...<br /> Quoi de neuf sous le soleil ?<br /> bonne journée à tous,<br /> Mokuku
Répondre
X
Ce que je trouve assez surprenant/drôle/agaçant c'est que les informations et liens intéressants viennent quasi systématiquement des intervenants.Mais est-ce vraiment durable comme solution? Les intervenants finiront-ils par se lasser et laisseront-ils les lecteurs dans la fumée déboussolante ou continueront-ils leur travail d'aiguillage salutaire?
Répondre
A
Il faut au contraire s'en réjouir. N'est-ce pas le principe même du blog? Je suis pour ma part ravi d'avoir des intervenants de qualité proposant des liens fort instructifs. Devrait-il y avoir compétition ?
C
Bilan CIRC 2002-2007<br /> Forme et motifs d'action ?<br /> Je ne gloserai pas sur le coté post moderne des formes de luttes adopté par le mouvement anti prohibitionniste lié au Cannabis. Le CIRC a certainement muté ces dernières années. Techniquement et sous les coups de boutoirs.<br /> L'émergence des Grow shop, le basculement d'une partie militante importante vers ces lieux, a été un pas important effectué vers la professionnalisation d'acteurs cannabiques. A noter qu'un comptoir de commerce est un lieu d'échange d'information ouvert qui contribue à modifier les rumeurs et pratiquer la réduction des risques.Le CIRC est un des acteurs de la réduction des risques au niveau national; Même moins médiatisé, nous entretenons des relations particulières autant avec  des acteurs des AFC, Association Française de Réduction des Risques, présidée par Anne Coppel, autant qu'avec la MILDT ou l'OFDT, Syntes. Nous ne travaillons certainement plus au même niveau avec les instances gouvernementales qu'auparavant sous Jospin. Préférer la méthode Maesttracci à la méthode Jayle, pour les intimes n'est pas un crime., c'est de la lucidité. Nous avons appris la rébellion de Médecins du Monde sur l'interdiction du testing produit. Notre dernière alerte sur la weed au verre et autres produits de coupe a été relayée et prise au sérieux jusqu'en Suisse et en Belgique. La stratégie frontale Vendre des graines pour l'autoproduction tout en restant dans le cadre des Lois. Ne pas renoncer à renseigner et organiser la lutte contre la répression et ses conséquences sur les personnes. Tout ça sous l'oeil du Big Brother à talonnettes actuel ! La stratégie frontale, c'est aussi d'interpeller l'opinion publique avant que ne demarre réellement la séance des débats pour les présidentielles où la question reviendra sous des formes nouvelles. La question de l'autoproduction, des graines, la dépénalisation totale de la consommation, l'Europe et le rapport Catania, ces sujets seront de la campagne et nous osons croire que même réduit à la seule hypothèse improbable d'un duel Royal Sarkozy, comment imaginer qu'ils puissent avoir la même position sur le fond de ce qu'il faut faire ? Notre tâche est de motiver le débat et les solutions que nous proposons. Le bilan presse en atteste, le CIRC émerge dans ce domaine, aussi pour le sérieux et le caractère informé de ses positions sur le Cannabis, une longue histoire en crédibilité.Nos sympathisants ne s'y trompent pas. Si le CIRC a peu de militants à deux pieds colleurs d'affiches et porteur de banderolle, créateurs et animateurs de sites internet ou lobbyiste politique et médiatique sont dans les blocks et les sites et blogs qui y sont consacrés sont très dévellopés. Les techniques d'informations aussi. Et nous sommes à la page recevant par le Net un certain nombre de témoignages autrefois recueillies de bouche à oreille. Oui, pourtant il serait plus facile de travailler avec une figure de proue médiatique. J'avais pensé à Kate Moss mais c'est un peu cher et elle est déja prise. Doc Gynéco ? Déja pris aussi.  Sérieusement, ce n'est pas au CIRC de quémander ce genre de soutiens. Par ailleurs le soutien des artistes passent par leur Art. Celui des médiateurs ou Presse passent par le Nouvel Obs ou Ardisson. Notre effort sur les médias, notre réel contact avec les fumeurs de joints fait du CIRC un collectif qui affronte la réalité sociale et politique et judiciaire du Cannabis. Et de près. C'est notre but, je ne pense pas que ce qui reste des "fumeurs invétérés" du CIRC encore actifs et réactifs face à l'actualités n'aient à rougir de leur bilan de revue de presse TV, Radio, Presse écrite et internet. Même de Guingamp, C'est dire.Peut être parler des autres formes de militantisme qui pourraientt naître dans les prochaines années modifiera, Arnaud, ton point de vue sur les activités réelles des CIRCs encore en vigueur en ces temps de frimats répressifs. Et les Cannabis social Club ? Club privé fermé réservé à la mise en contact de malades avec des producteurs indépendants.  Une mode occidentale que nous encourageons, ou enrageons de voir mettre en place prochainement. Avec quel rapport de force et quels risques ?La crédibilité du CIRC vient de ce qu'il se comporte comme un acteur social sur un sujet unique et pointu le Cannabis et qu'il n'y a aucune autre structure à s'y impliquer. Or le CIRC est une structure connexe sur le sujet transversal des drogues, des psychotropes légaux ou pas. Le CIRC ne faitr pas que de débattre à moitié entrain de s'étouffer sous les vagues répressives. Le CIRC surfe sur un mouvement sociologique gonflant depuis les années 70, 80 que des personnes de talent ont su entretenir malgré les heurts judiciaires. Pour être auditionné au Sénat, sur un plateau TV parisien, par un tribunal, pour un 18 juin, un nombre de compétences sont partagées entre les actifs du collectif actuel du CIRC, compétences nourries des dialogues avec les collectifs connexes aux autres problématiques liées à la consommations de drogues. Le CIRC en appelle à tous ceux qui trouvent scandaleux l'attitude gouvenrementale, pénale, ainsi que la stigmatisation des « drogués » à nous rejoindre , et pourquoi pas un journaliste ?De toutes façons, nous en saurons plus de tout celà dans les prochaines semaines présidentielles.Collectif d'Information et de Recherche Cannabique
Répondre
A
Le bilan me paraît assez juste et je n'ai pas à me forcer pour rendre hommage au travail fourni par le Circ depuis des années, j'espère qu'il n'y a aucune méprise à ce sujet. Reste un os: pourquoi tout cela ne passe pas? Pourquoi y a-t-il toujours aussi peu de monde lors des manifestations du 18 joint? Pourquoi les sondages restent-ils bloqués à moins de 30% de Français en faveur de la légalisation? Il est une chose d'être juste et courageux dans sa démarche, une autre d'être compris. J'expérimente moi-même cette difficulté, un de mes contradicteurs les plus résolus m'ayant même taxé de défendre la fumigation du pavot en Afghanistan. En d'autres temps, sur un forum consacré aux enthéogènes, un lecteur me dépeignait en vieux père de famille catho intégriste de la prohibition inquiet pour ses enfants… Force est de constater que le débat sur la légalisation n'avance quasiment pas en France: les mêmes qui signaient l'appel du 18 joint en 1976 le refusent aujourd'hui. A chaque présidentielle précédente, le cannabis a un tant soit peu existé dans le débat, il en reste totalement absent aujourd'hui (y compris dans les colonnes de mon journal…). Jean-Pierre Galland (du Circ) était candidat des Verts aux Européennes en 1999, je doute fort que cela soit imaginable aujourd'hui alors que Voynet refuse de se pronnoncer pour la dépénalisation.En ce qui concerne la figure de proue, je me doute que cette question est délicate. Je pense malheureusement qu'il faut accepter les règles du jeu médiatique. Comme me le disait lors des assises nationales de la réduction des risques un intervenant de Montpellier, il faudrait trouver la Line Renaud de la légalisation. C'est peut-être carricatural mais ça reste vrai.Au cours de mes nombreuses conversations avec Jean-Pierre (qui a été un temps cette figure de proue avant d'être ruiné par ses condamnations successives), ce dernier m'a souvent fait part de son découragement face aux incessants retours en arrière, aux difficultés à mobiliser les fumeurs pour défendre leur propre cause. C'est de toutes ces difficultés dont je me fais l'écho ici. Loin de moi l'idée de mettre en cause qui que ce soit, je m'interroge juste sur les raisons de la stagnation du débat français. J'espère que ce blog contribuera, comme le font le Circ et d'autres depuis bien plus longtemps que moi, à faire avancer les choses.
A
Je retiens cette citation d'Arnaud Aubron : "Si le discours de la légalisation n'est aujourd'hui pas audible, il faut prendre en compte ce rejet et inventer des concepts ou un discours nouveaux".<br /> Ce discours, n'importe quel militant actif du CIRC peut se le prendre dans la figure. Depuis 25 ans que des personnes se sont engagés pour la légalisation, combien ont été condamnés rendant leurs discours inaudibles. Jean-Pierre Galland et Laurence Duffy ont pris solidairement 240 000 francs d'amende en 2003 pour incitation. Kshoo le porte parole a suivi. L'équipe du CIRC Bretagne a été décimée suite à son dernier collage en 2004 avec, entre autres, un militant au trou pour cinq ans (il n'avvait pas à avoir 1,9 kilos chez lui aussi et être colleur d'affiche). Que dire de ce militant de Nancy condamné en 2005 à 8 mois ferme pour 40 gr de shit et saisie de 8000 euros de matériel militant. Et combien d'autres ?<br /> A ce qu'il me semble, en tant que responsable de locaux cannabiques depuis 1997, et discutant avec autant de symphatisants à longueur de journée, je ne vois pas le discours du CIRC comme inaudible y compris chez les prohibitionnistes ignorants ou trop perméables au discours réac sur le Canna;<br /> L'inaudibilité de notre discours est bien organisé au point d'être caricatural lorsqu'un procureur de la République me sort en procès qu'en France , il est possible de militer pour la légalisation pour ensuite mieux me repprocher mes écrits dans le bulletin du CIRC, les affiches que j'ai pu éditer et coller sur les murs, voir en demandant 6 mois ferme pour la réalisation de notre ancien site Cannabistrot.net.  Alors là, évidemment il faurt non seulement inventer un autre discours, mais aussi de nouveaux supports (que supportent les procureurs).<br /> Si le CIRC 2002 2007 est représentatif des possibilités offertes par la protection de la Liberté d'expression sous Sarko-Chirac, une phrase le résume : Ferme ta gueule. Une autre discours qui ne risque pas d'être compris. Cette dernière période a d'ailleur été marqué par la recrudescence de la répression sur le mouvement social en général de Bové aux anti marée noire,  des syndicalistes aux anti CPE. <br /> Merci quand même aux médias qui tel Libé nous ont laissé exprimer cette opinion. comme quoi elle peut être quand même comprise. 
Répondre
A
Je peux aisément comprendre l'agacement de ceux qui se battent sur le terrain pour faire avancer leurs idées et le paient effectivement très cher.Je ne le nie aucunement, j'en donnais d'ailleurs acte dans une réponse précédente de ce même fil: "Ce qui renvoie à l'incapacité des antiprohibitionnistes à se faire entendre d'un large public, pour des raisons qui leur sont propres mais aussi parce que le débat est pris en otage en France (pour cause d'incitation à la consommation). "Mais peut-être justement que cette stratégie frontale n'est pas aujourd'hui la bonne. Peut-être faut-il imaginer d'autres formes d'actions plus "subversives", contourner la répression du débat sur les drogues plutôt que de s'y heurter de plein fouet. Au risque de vous épuiser.Je lisais dimanche un post sur un forum antiprohibitionniste où un participant disait à propos de la lettre à Ségolène Royal que vous (le Circ) devriez-vous inspirer du sens du marketing des Enfants de Don Quichotte. Facile à dire et très discutable je sais, mais ces réactions sont assez fréquentes sur des sites et dans des débats pourtant tout sauf prohibitionnistes. On ne peut nier que, comparé au nombre de fumeurs, celui des militants est plus que faible. La répression n'y est pas pour rien, mais elle n'explique pas tout.Cette question mérite d'être posée. Comment "crédibiliser" en France la question de la légalisation des drogues ?Comment trouver des relais d'opinion, des emblèmes, des causes auxquelles le public pourrait s'identifier, au-delà du cercle des fumeurs invétérés?
G
La majorité n'a pas toujours raison.
Répondre
A
Loin de moi cette idée. Mais la majorité pose des questions qui doivent être entendues et auxquelles on doit, sous une forme ou une autre, apporter des réponses si l'on souhaite trouver une solution efficace et acceptable par tous. Si le discours de la légalisation n'est aujourd'hui pas audible, il faut prendre en compte ce rejet et inventer des concepts ou un discours nouveaux.